De capes et de crocs, T.7 : Chasseurs de Chimères
De
cape et de crocs, l'excellente série du duo Ayroles
(scénario) et Masbou (dessin) se fend donc d'un nouveau tome.
Les
picaresques et fantasques pérégrinations du goupil Armand Raynal de
Maupertuis, du leu Don Lope Villalobos y Sangrin et du lapin Eusèbe les
ont donc menés sur l'astre lunaire.
Le tome 6 avait apporté une
légère pointe de déception. Certes, tous les éléments faisant la
recette et le charme de la série étaient là, mais il manquait une
petite touche de fantaisie dans cet univers absurde et pourtant si bien
construit. Probablement était-ce dû au départ d'un nouveau cycle,
nécessitant par là-même l'exposition de nouveaux lieux et personnages.
L'erreur est corrigée dans Chasseurs de chimères.
D'emblée,
on se retrouve dans un sombre bouge où nos héros ont maille à partir
avec la vermine locale. Mais point de duel à l'épée dans ces premières
pages : la joute est verbale, et c'est avec un plaisir non dissimulé
qu'Ayroles pastiche les battles des rappeurs, en alexandrins ronflants
aux suaves accents désuets.
Le reste de l'album est à l'avenant de
cette hilarante introduction : savant fou au laboratoire empli de
merveilles pittoresques, espion à la cape passe-partout ne fonctionnant
que devant les murs en pierre, bateaux à roues, j'en passe et des
meilleures.
Les grands classiques font également leur retour, que ce
soit au niveau du "perroquet" du capitaine Boone ou les hurlements
d'effroi de l'équipage de pirates à la vue du si mignon lapin Eusèbe.
N'oublions pas les deux pages de garde finales, qui rappellent les
grandes heures de la série (fin du tome 3 et début du tome 4).
L'intrigue
avance pour autant tambour battant, là où l'on aurait pu craindre
qu'Ayroles ne dilue son scénario pour profiter le plus longtemps du
confortable pécule que doit rapporter cette série au succès mérité.
Bien plus, même, le bougre en profite pour lever le voile sur le passé
d'Eusèbe, quand bien même on n'en saura que trop peu concernant sa vie
mouvementée.
Quant au dessin, Masbou s'est encore une fois surpassé.
Il était difficile de penser qu'il eut pu faire mieux que sur les tomes
précédents, et pourtant si. On ne pourra que s'extasier devant la scène
d'apocalypse maritime de la planche 42, mais c'est oublier sa subtile
mise en couleurs, en tout point parfaite. Sans oublier les nombreux
gags en arrière plan, qu'on ne se lasse pas de chercher encore et
encore, à l'instar des premiers Lanfeust mais en
beaucoup mieux.
Encore plus beau, encore plus fouillé, encore plus
drôle, encore plus référencé, ce septième tome se lit et se relit
toujours trop vite. La patience est donc de mise en attendant le tome 8
qui, espérons-le, continuera sur la lancée de Chasseurs de
chimères. Mais la confiance reste de mise : il est
quasi-impossible pour les auteurs de gâcher le potentiel qu'un tel
album laisse en gestation.